Je
me retournai
immédiatement afin de découvrir celui qui osait se dresser au beau
milieu de cette foule de lutins pour me venir en aide. Je ne le vis
pas tout de suite mais Will apparut
furtivement dans toute cette cohue. Des cris retentirent et la foule
s'agita. Je tentai
de me défaire de l'étreinte de leur prince mais il serrait ma main
bien trop fort même en portant son attention sur l'affolement
général.
-
Suivez-moi
princesse. Me lança-t-il tout en tentant de m'entraîner.
-
Non. Résistai-je
de toutes
mes forces.
Alors
qu'il me faisait traverser la foule, je sentis
une main se refermer autour de mon autre poignet et me tirer en
arrière. Je ne pus retenir un cri
de surprise. Cela eut au moins l'effet de stopper le prince dans sa
course. Je me retournai
et fixai
mes yeux sur
celui
qui venait d'intervenir. Lewën était là. Je lui souris
alors qu'il me tirait
d'un coup à lui, surprenant le prince qui me lâcha mais se retourna
aussitôt. Lewën me tira derrière lui, mit sa main dans la mienne
et me
maintint
dans son dos.
-
Reste derrière moi.
Je ne lui
répondis
que par
un hochement de tête, qu'il ne put voir puisqu'il maintenait toute
son attention sur son ennemi. Il le tenait à distance d'une épée.
Je ne pouvais pas voir son visage, mais blottie
contre son dos, je pouvais sentir la tension de ses muscles. Un vrai
chaos régnait tout autour
de nous, sans que jamais, personne ne me touche ou même ne me frôle.
Lewën me fit tourner, puis reculer doucement. Il me dirigea sans
prêter attention aux différentes bagarres qui éclataient
ça et là, le seul ayant
son
attention était le prince lutin. Nous fûmes vite dans les bois mais
le prince ne nous avait
toujours pas quittés,
il avançait à mesure que nous reculions. Ni l'un ni l'autre, ne
parlait mais une tension terrible nous enveloppait.
Nous finîmes
par nous arrêter.
-
Johanna, je veux que tu cours droit devant, ne dévies pour rien de
ton chemin, toujours tout droit et tu arriveras en ville.
-
Et toi ? Demandai-je
affolée.
-
J'ai une dernière chose à faire.
-
Je refuse de te laisser.
-
S'il te plaît.
Cours. Je te rejoins dès que je peux.
Prise
entre deux émotions, je décidai
finalement de l'écouter. Mais avant de partir, je déposai
mes lèvres sur les siennes.
-
Vous avez créé
le lien. Cracha le lutin.
-
C'est lui que j'aime. Je ne refusais pas de m'unir à vous pour ce
que vous êtes mais parce que j'en aime un autre.
-
Foutaise. Même s'il n'existait pas, mon apparence vous aurez rebutée
de toute manière.
-
Cours, mon amour, cours maintenant.
-
Je t'aime.
-
Je t'aimerai
toujours.
Sur ces
dernières paroles, je me mis à courir tout en tenant ma robe de
chaque côté
pour qu'elle ne me gêne pas dans ma fuite.
J'en avais
le cœur brisé de devoir abandonner derrière moi Lewën. Nous ne
faisions que ça, nous retrouver pour nous séparer. Quand cela
allait-il enfin finir ? Quand allions-nous
enfin pouvoir vivre en paix ?
Je courus en suivant les instructions de Lewën, personne ne me
poursuivait et pas une voix ne se faisait entendre. J'entendais juste
les bruits d'une bataille qui s'éloignaient de plus en plus mais je
n'y prêtai
pas plus d'attention et je courus le plus vite possible dans la
direction que Lewën m'avait demandé de suivre. À plusieurs
reprises,
je faillis
tomber, ma robe s'accrocha à plusieurs branches mais je ne déviai
pas et poursuivis
droit devant. Mon pied se prit dans une racine, me faisant tomber. Je
dus
me cogner et perdre connaissance. Quand j'ouvris les yeux, un silence
pesant régnait dans la forêt. Ne sachant pas si cela était bon
signe ou non, je repris ma course.
Lorsque je
fus enfin sortie
de là, un grand soulagement s'empara de moi. Je reconnus
immédiatement l'endroit où je me trouvais et me dirigeai
directement vers chez moi pour trouver refuge dans ma chambre et
rassurer ma mère. Qu'allais-je bien pourvoir lui dire ?
Elle avait du s'inquiéter comme une folle et ameuter tout le monde.
Comment allais-je me sortir de ce mauvais pas ? Je voulus sortir mes
clefs mais je m'aperçus très vite que ces dernières étaient
restées dans ma poche. Je dus alors frapper et attendre que les
foudres de ma mère s'abattent sur moi lorsqu'elle me verrait devant
la porte.
-
Johanna ? Tu n'as pas tes clefs que tu sonnes ?
-
Je...eux...j'ai dû les perdre dis-je me sentant bête.
-
Tu en es certaine ?
-
J'en ai bien peur oui.
Je pensais
qu'elle serait folle d'angoisse mais au lieu de ça, ce qui
l'inquiétait
était la perte de mes clefs.
-
Et bien rentre, qu'attends-tu ?
-
Rien, rien.
J'entrai
et me dirigeai
directement vers les escaliers pour prendre une bonne douche et ôter
cette robe qui me rappelait tellement de mauvais souvenirs.
-
Johanna. M'interpela ma mère.
-
Oui ? Dis-je sans redescendre pour autant.
-
Qu'as-tu donc fait pour mettre cette robe dans un tel état ?
-
Je...j'ai...tu sais combien je suis maladroite, j'ai glissé pile
dans une flaque de boue.
-
C'est bien toi !
-
Je monte me doucher.
Je me
dirigeai
directement dans ma chambre et sautai
dans ma baignoire pour me plonger dans l'eau. J'espérais que ça
m'apaiserait
mais non, je ne pouvais m'empêcher de penser à Lewën et Will. Ils
n'étaient pas rentrés
et j'espérais que tous
les deux allaient bien. J'espérais aussi que rien ne soit arrivé à
Marin et ce même après ce qu'il avait fait. Il faudrait aussi que
je vois avec Lewën pourquoi ma mère ne semblait
pas s'être aperçue
de mon absence. Toutes ces choses qui me trottaient dans la tête me
donnaient la migraine. Je m'immergeai
entièrement sous l'eau et tentai
de me vider l'esprit. Le manque d'air me fit remonter. J'achevai
de me nettoyer et après ce que j'avais vécu dans ces bois j'en
avais vraiment besoin. Je me lavai
ensuite les cheveux et sortis
de l'eau. Une serviette enroulée autour de moi et une autre entre
les mains,
me frottant activement les cheveux, je me rendis
dans ma chambre.
-
Tu es vraiment magnifique !
En
entendant cette voix, je relevai
directement la tête dans sa direction.
-
Humm
quel regard !
-
Que fais-tu ici ? Comment es-tu entré ?
-
Je suis venu voir comment tu allais ou devrais-je dire comment vous
allez princesse. Et c'est ta mère qui m'a ouvert.
Je
soufflai
bruyamment et restai
à distance, sur la défensive. Il n'oserait quand même pas me
kidnapper à nouveau et dans ma propre maison quand même. J'observai
tout autour de moi afin de voir ce qui pourrait m'aider à me
défendre. Hormis ma brosse à cheveux, ma paire de chaussures et
quelques bricoles inutiles, je ne vis rien qui puisse m’être
d'une quelconque utilité. Marin avança vers moi, je fis un pas en
arrière avant que mon dos ne soit stoppé par ma commode. J'étais
coincée. Prise au piège dans ma propre chambre. Marin approcha d'un
pas de plus, un sourire espiègle sur les lèvres et le regard
sombre.
-
Tu as peur de moi ?
-
Non dis-je la voix peu assurée.
-
Tu mens, ça se voit
à ta tête.
Il avança
à nouveau. Il ne restait que deux ou trois pas avant qu'il ne soit
collé à moi. J'attrapai
maladroitement mon flacon de parfum et le lui lancai,
en vain, il se jeta sur moi, menaçant. M'attrapant par la taille, il
se colla à moi m'appuyant contre le bois dur de ma commode. Il
s'apprêtait à m'embrasser, mais je tournai
la tête. Ses lèvres atterrirent sur ma joue.
-
Laisse-toi
faire, on pourrait être heureux ensemble. Me murmura-t-il à
l'oreille, ses mains toujours sur mes hanches.
Je tentai
de toutes mes forces de le repousser, de l'éloigner de moi. Je
voulais qu'il retire ses mains de mon corps, qu'il cesse de faire
courir ses lèvres dans mon cou. Marin finit
par se reculer et plongea son regard dans le mien.
-
Tu es si belle.
-
Laisse-moi
tranquille.
-
Je t'aime toujours Johanna.
-
Je ne t'aime pas !
Il me fit
tourner et me bascula sur mon lit, pressant son corps sur le mien. Il
maintint
mes bras au-dessus
de ma tête d'une main alors que la seconde me caressait la joue. Je
détestais la tournure des choses.
Ma pudeur n'était protégée que par une simple serviette dont le
bas avait été légèrement remonté le long de ma cuisse par la
pression de Marin. Il fit descendre sa main le long de mon cou, sur
mon épaule dénudée, le long de mon bras.
-
Marin, laisse-moi,
je t'en supplie.
-
Tu es magnifique...
Il
m'embrassa. Je ne pus détourner la tête et ses lèvres
rencontrèrent les miennes malgré moi. Je sentis
sa main libre remonter
le long de ma cuisse, jusqu'à ma taille. Elle entraînait avec elle
le tissu
éponge qui me protégeait. J'avais beau remuer dans tous les sens,
cherchant à lui faire perdre l'emprise qu'il avait sur moi, rien n'y
faisait.
-
Ne fait
pas ça, le suppliai-je
les larmes coulant sur mes joues.
-
Je ne vais pas te faire de mal.
-
Laisse-moi
partir alors, hoquetai-je.
-
Pas maintenant.
Sa main se
posa sur le nœud que j'avais fait
pour maintenir la serviette.
-
Et si je...Me lança-t-il les yeux pleins
de défi.
-
Non dis-je en pleurs, non...
De ses
doigts, il tira sur le bout du tissu,
je fermai
les yeux, abandonnant tout combat, il était bien trop fort pour moi.
Alors que j'attendais impuissante que ses mains rencontre ma peau je
le sentis s'éloigner dans un mouvement brusque. J'ouvris les yeux et
vis Lewën le maintenir contre le mur opposé.
-
Johanna ?
J'attrapai
frénétiquement ma serviette et la serrai
contre moi, me recroquevillant sur moi-même
contre la tête de mon lit, la tête cachée dans mes bras.
- Vas t'occuper
d'elle Len, je m'occupe de lui.
Une main se
pausa sur mon épaule, me faisant sursauter. Il retira aussitôt sa
main.
- Johanna, c'est
moi, c'est Lewën.
Je
le sentis poser à nouveau sa main sur moi, provoquant un nouveau
sursaut, mais il ne la retira pas et m'attira contre lui.
Ce ne
fut qu'en
sentant son odeur et la chaleur de son corps contre le mien que je me
sentis en sécurité. J'entendis des pas puis nous nous retrouvâmes
dans le silence.
-
Johanna, regarde-moi
s'il te plaît.
Je levai
sur lui mon regard rempli
de larmes.
-
Tu ne risques plus rien, je suis là et je ne te laisserai
plus.
-
J'ai eu si peur, j'ai bien cru qu'il...
-
C'est fini. Will l'a emmené.
-
Où ?
-
Il doit être libéré de l'enchantement. Ensuite, nous lui
effacerons la mémoire et il retournera chez lui et reprendra sa vie.
-
Il n'était pas lui. Dis-je en réprimant de nouveaux
sanglots à la pensée de son comportement.
-
Ça n'enlèvera pas ce qu'il a fait, mais non, il n'était pas
lui-même.
Je blottis
à nouveau ma tête contre son torse. Lewën s'allongea à moitié
sur le lit le dos appuyé sur la tête de lit et d'une caresse dans
le dos, m'attira vers lui. Je me laissai
faire, calai
ma tête contre lui, étendis
mes jambes, mon corps épousant parfaitement le sien et lui lançai
un regard plein de gratitude.
-
Ferme les yeux et dors.
Je secouai
la tête. Je ne voulais pas dormir, j'avais bien trop peur qu'il
disparaisse à nouveau pendant mon sommeil.
-
Johanna, tu as eu plus que ton quota
d’émotions fortes.
Repose-toi.
Je fis de
nouveau non de la tête.
-
Je serai
là à ton réveil.
-
Promis ?
-
Je t'en fais le serment, tu me trouveras auprès de toi à ton
réveil.
Il déposa un
tendre baiser sur mon front.
-
Maintenant, dors.
Je
me grandis et déposai
avec douceur mes lèvres sur les siennes avant de lui faire un grand
sourire et de me caler pour céder au sommeil.
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