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23 juin 2012

Chapitre 16




Quand je repris enfin connaissance, tout était sombre autour de moi et je ne pouvais pas bouger. Mes mains étaient nouées dans mon dos, attachées à quelque chose de froid et de très dur mais que je ne pouvais pas identifier. Je tentai de tirer sur les liens, mais tout ce que je gagnai, ce fut une douleur. Je tentai d'adapter ma vue à la pénombre, mais pas la moindre lueur ne passait là où j'étais, pas le moindre bruit non plus. Que m'était-il arrivé ? Je tentai de remettre en ordre mes souvenirs cessant de brutaliser mes pauvres poignets déjà douloureux. Comment avais-je atterri ici ? Je me souvenais d'avoir vu Will, nous avions eu une longue conversation, Len devait venir, et ...j'avais...Marin, j'avais vu Marin. Il était venu me voir alors que je venais de rentrer. Nous avons...et puis il y a eu cette odeur...

- Marin. Cirai-je en espérant qu'il ne serait pas très loin. Marin. Criai-je encore.

J'entendis des bruits non loin mais mes yeux ne distinguèrent pas la moindre silhouette, la moindre ombre. Je sentais qu'on m'observait, quelque part autour de moi, il y avait quelqu'un, j'en étais persuadée ou était-ce simplement mon imagination ?

- Marin. Tentai-je à nouveau en hurlant de toutes mes forces.

Nous avions dû être attaqués. Je ne voyais que ça. Pourvu qu'il ne lui soit rien arrivé, pourvu qu'il aille bien. Je l'avais suffisamment fait souffrir comme ça.
J'entendis finalement des pas, quelqu'un marchait sur ce qui me semblait être un tapis de feuilles ou de branchages secs et ça se rapprochait de moi. Je vis d'abord deux billes luire, puis une petite lumière s'alluma et ce que je vis m'arracha un hurlement de terreur.
Bloquée par ce qui était dans mon dos je ne pus reculer, je tirai de toutes mes forces sur les liens qui m'immobilisaient mais en vain. Lorsqu'il se rapprocha, un goût aigre me monta à la bouche et j'eus beaucoup de mal à retenir au haut le cœur. Mon sang s'était figé instantanément à l'entrée de cet intrus et la seule façon pour moi de me couper de cette vision d'horreur fut de fermer les yeux. C'était bien la seule chose que je pouvais contrôler, entravée de la sorte.
Ce n'est qu'un rêve, ce n'est qu'un rêve, un rêve, un rêve....me répétai-je plusieurs dizaines de fois avant d'ouvrir à nouveau les yeux. Mais malheureusement pour moi ça ne l'était pas et la créature face à moi était bel et bien réelle, et je savais exactement à quoi j'avais à faire. Lewen m'en avait parlé et j'avais déjà eu à les croiser avec Will. Il s'agissait d'un lutin.
Il alluma différentes torches de-ci de-là et très vite je pus voir où j'étais. Une grande pièce au sublime mur blanc incrusté de pierres précieuses brillantes qui renvoyaient, grâce à la lueur des torches enflammées, ça et là des reflets multicolores. Les meubles dans la pièce étaient eux aussi d'une beauté extrême. J'étais assise sur un épais coussin doré. Étais-je en train de rêver ? On se serait cru dans un château des mille et une nuits.



- Content de voir que vous êtes revenue à vous princesse.



Je tournai la tête vers la voix rauque qui venait de s'adresser à moi. Tout en lui me répugnait, mais sa vue ne me souleva pas de nouveau haut le cœur, je ne saurais l'expliquer. Il avait fixé sur moi un regard sombre mais tellement humain. Il n'était pas très grand, et comme me l'avait décrit Lewën ses membres étaient crochus. Il était d'une laideur extrême. En le voyant ainsi, l'histoire de la princesse racontée par Will me revint. Je compris soudain son choix, comment aurait-elle pu choisir un époux pareil ?



- Comment avez-vous osé me kidnapper ! M'écriai-je.
- Mais nous ne vous avons pas enlevée, vous nous avez été conduite.
- Livrée de force, vous voulez dire !
- Bientôt, vous serez unie à notre prince, notre peuple sera heureux.
- Quoi ?



Il m'avait donc emmenée ici pour m'unir à l'un d'eux.



- À l'aide criai-je de toutes mes forces. Lewën, Will, au secours...Marin.....
- Tu m'as appelé ? me lança l'intéressé en entrant alors que l'autre partait.
- Tu vas bien. Dis-je soulagée.
- Évidemment.
- Il faut que tu m'aides à partir d'ici. Fais quelque chose. Détache-moi s'il te plaît. Lui murmurai-je, le lutin se tenant dans l'encadrement de la porte.
- Mais si je te détache, tu vas vouloir partir en courant, me répondit-il sur le même ton.
- Oui, c'est là le but.
- Mais je ne t'ai pas conduite ici pour que tu t'échappes.



Je me repassai ses dernières paroles en boucle dans la tête. J'avais du mal comprendre. Marin ne pouvait pas me haïr à ce point, il ne pouvait pas m'avoir enlevée et jetée dans la gueule du loup. Non, il ne pouvait pas avoir fait ça. Il n'était même pas au courant de ce que j’étais, de ce que j’allais être.



- J'ai mal compris, m'emportai-je.
- Non, non.
- Sors d'ici, va-t-en, hurlai-je après lui.
- Je...
- Sors, hurlai-je à nouveau. Dehors !



Marin sortit, le lutin juste derrière lui. Aussitôt ce dernier fut-il dehors, que la magie de l'endroit se rompit. Seuls les flambeaux étaient encore allumés. J'aurais préféré ignorer encore un moment que tout ceci n'était que mensonge. Ma claustrophobie se réveilla alors que je m'apercevais de la grandeur et de la petitesse de l'endroit. C'était une pièce très vaste au mur marron, comme fait avec de la boue, il n'y avait aucun meuble, rien du tout. Ce qui réveilla ma phobie, était la bassesse du plafond, j'étais certaine que je ne tiendrais pas debout. La beauté de l'endroit avait disparue. Un épais tapis feuillu sur lequel j'étais assise avait remplacé le coussin. J'eus soudain la sensation que j'étais perdue, que rien n'y personne ne pourrait plus me sauver. Lewën et Will le pourraient, si seulement ils savaient que Marin m'avait enlevée et que j'étais retenue ici.
Lewën devait passer ce soir, ma mère lui dirait combien elle était inquiète, que je ne sois toujours pas revenue. Il était le seul qui pourrait faire quelque chose. Peut-être que le lien entre nous serait assez fort pour le conduire ici. Pourvu qu'il ne vienne pas seul, se serait dangereux pour lui.
Tout un tas d'inquiétudes me trottèrent soudainement dans la tête. Qu'est-ce que j'allais devenir ? Désemparée, je me mis à pleurer et très vite, la fatigue s'empara de moi. Je ne pus lutter et cédai.
Quand j'ouvris à nouveau les yeux, j'étais plongée dans la pénombre, seule une faible lueur s’échappait de l'une des torches. Elle n'allait certainement pas tarder à s'éteindre comme les autres. Tout était silencieux. Nous devions être en pleine nuit. Je ne sais vraiment comment, mais je parvins à dénouer un peu le lien qui me retenait. Pas entièrement mais suffisamment pour que je puisse passer mes mains l'une après l'autre. Je me relevai, me frottai les poignets et me dirigeai vers la porte avant de m'arrêter. Ils avaient sûrement du mettre un guet. Je parcourus toute la pièce, à la recherche d'une issue, mais ne trouvai rien. Le seul moyen de sortir d'ici était la porte, mais je ne tenais pas vraiment à me retrouver face à face avec l'une de ces créatures. Je me mis à l'autre bout, et commençai à gratter à l'aide de mes doigts les murs qui étaient bel et bien faits de terre. Je fis le moins de bruit possible. Au bout d'un moment, je parvins à traverser le mur. L'air frais m'arriva. Je redoublai d'effort et poursuivis ma tâche. Un bruit me fit arrêter. Je retournai en toute hâte me mettre là où j'étais et fis semblant de dormir.
Des pas s'avancèrent. Pourvu qu'ils ne repèrent pas mon trou.



- Elle dort encore, entendis-je chuchoter non loin.
- Laissons-la dormir encore un peu.
- Le jour n'est plus très loin.
- Laissons-la. Je veux que ma princesse soit de toute beauté pour notre union.



Les deux voix s'éloignèrent. J'eus juste le temps d'ouvrir les yeux pour voir qu'il s'agissait de deux lutins. Une fois certaine qu'il n'y avait plus de danger, je me remis à gratter le mur jusqu'à ce que l'espace soit suffisamment grand pour que je puisse passer. Heureusement que je n'étais pas très épaisse. Une fois de l'autre coté je pris doucement la fuite en évitant de faire du bruit. Comme l'avait dit le lutin, le jour allait se lever. Il fallait que je me dépêche de sortir des bois. Lewën me l'avait dit une fois, les lutins ne peuvent pas sortir de la forêt, moi si. J'essayai de me repérer du mieux que je pouvais mais la tâche était difficile tant les arbres étaient semblables. Je me mis donc à marcher droit devant, peu importe où j'allais arriver du moment que je sortais des bois. J'avais marché longtemps avant que les voix des lutins ne me parviennent.



Johanna, tu fais une erreur, nous ne sommes pas tes
ennemis. Reviens vers nous princesse.


Visiblement, ils ne savaient pas où je me trouvais exactement. Moi non plus malheureusement. Les voix continuèrent de m'appeler, mais je n'y fis pas attention, continuant de courir droit devant.
Le jour était levé, je sentais la fatigue me couper les jambes. J'avais cessé de courir et poursuivais ma fuite en marchant. Par moment, j'avais l'impression que les lutins se rapprochaient mais jusqu'à maintenant, ils ne m'avaient pas mis la main dessus et je comptais bien m'en sortir.
Si seulement Lewën pouvait être là ! Me cherchait-il seulement...
Je sentis soudain quelque chose manquer de peu de m'accrocher le bas de la jambe. Je retins un cri et repris ma course. Je devais sortir de là. J'étais une princesse, j'allais devoir m'occuper de tout un peuple alors je pouvais bien me sortir de cette fichue situation.



Nous nous approchons princesse
Votre union au prince n'est plus très loin



Je commençais à avoir la sensation que je tournais en rond. Au vu de la hauteur que prenait le soleil, cela faisait des heures que je m'étais enfuie. J'avais la désagréable impression que j'étais fichue, que les lutins allaient m'attraper et que bientôt mon futur royaume serait uni au leur et moi à l'une de ces créatures par la même occasion. Quelle horreur ! Cette vision terrifiante me motiva à poursuivre ma fuite. L'épuisement, une part de maladresse et une de malchance me firent trébucher. Je tentai de me relever aussitôt mais mon genoux me fit mal. J'eus beaucoup de peine à me remettre debout mais y parvins, je repris ma route avec une lenteur exaspérante et malheureusement pour moi, l'une de ces créatures me mit la main dessus. Je poussai un hurlement, me débattis du mieux que je pus mais il ne me lâcha pas pour autant et très vite nous fûmes rejoints par d'autre lutins et...Marin était avec eux. Sans que je ne lui facilite la tâche, il me prit dans ses bras et me porta afin de me ramener dans leur campement.
Ce ne fut qu'à ce moment, que je me rendis compte du nombre incalculable de créatures qui vivaient ici. J'en eus un frisson.
Marin me déposa au beau milieu du groupe. Je lui lançai un regard des plus noirs, qui se voulait transmetteur de tout le mépris que j'avais pour lui à ce moment très précis.



- Princesse, me salua un petit bonhomme.
Je ne lui répondis pas. Il leva au ciel son bâton tordu puis le dirigea vers moi. J'eus peur qu'il ne me frappe avec alors je fermai les yeux en attendant de ressentir la douleur. Il ne se passa rien. Je rouvris les yeux et vis qu'il avait dirigé la pointe de son bâton vers mon genou. Cinq minutes plus tard ou plutôt ce que j'identifiai comme cinq minutes, la douleur s'était effacée.
Soudain, tous les lutins s'écartèrent et se courbèrent devant l'un d'entre eux. Ce dernier s'avança vers moi, tout sourire. Cette scène aurait pu être merveilleuse si ces créatures n'étaient pas si effrayantes.
Une fois son chemin tracé parmi les autres, le lutin s'arrêta à quelques centimètres à peine de moi. J'eus un mouvement de recul mais avant même que je n'ai pu m'éloigner de trop, il me retint par le bras.



- Je suis enchanté de faire enfin votre connaissance princesse.
- Ne m'en voulez pas, mais le sentiment n'est pas partagé, lui lançai-je sur le même ton qu'il avait emprunté.



Il n'en fut pas offusqué pour autant. Il céda même au plaisir de se moquer de moi et de rire ouvertement. Je voulus le gifler de l'autre main mais il bloqua mon geste, s'emparant de mon poignet. Il me tenait là, face à lui, et me fixait droit dans les yeux. Tout chez lui me répugnait, pas seulement son apparence mais son arrogance, sa façon de croire que je serais sienne. S'il comptait s'unir à moi, il allait devoir faire preuve de persévérance car je ne comptais pas lui rendre la tâche facile, loin de là.



- Habilleuses, cria-t-il.



Trois lutins, vêtus de robes de feuilles s'approchèrent. Il leur parla dans une langue que je ne connaissais pas et lorsqu'il eut fini, elles m'entraînèrent avec elles, escortées par deux lutins hideux et très impressionnants.



- Lâchez-moi ! M'écriai-je.
- Du calme princesse, nous allons juste vous préparer pour la cérémonie de ce soir.
- Quelle cérémonie ?
- Mais votre union évidemment. Vous avez beaucoup de chance, le prince est bel homme.



Bel homme...elle plaisantait...Lewën est bel homme, Will est pas mal non plus, Marin...oui lui aussi est mignon même s'il m'a trahie. Mais leur prince, cette chose, était loin d'être attirant. Elles m’emmenèrent jusqu'à une grande cabane. Les deux gardes se postèrent devant la porte et nous entrâmes. La pièce était très spacieuse et très lumineuse. Il y avait des torches accrochées tout le long des murs et de quoi assurer un minimum de confort. Un fauteuil, une petite table et deux petites chaises, le tout en bois. Au fond, une sorte de paravent en brindille. Elles m’obligèrent à passer de l'autre coté, me menaçant de faire appel aux gardes. J'obéis donc, inutile d'être brutalisée en plus. De l'autre côté, il y avait un trou rempli d'eau. Refusant de me déshabiller devant elles, elles me poussèrent toute habillée dedans. Habituée à l'eau, je restai un moment en dessous décidant de leur coller la frayeur de leur vie, leur faire croire qu'elles venaient de me noyer. Bon le trou n'était pas très profond, en me mettant debout, je n'aurais eu de l'eau que jusqu'à la poitrine. Prise de cours, je n'avais pas eu le temps de remplir mes poumons d'air, je n'allais pas pouvoir rester très longtemps au fond. De toute façon, on ne m'en laissa pas le temps. Deux lutins plongèrent et me sortirent de l'eau, me laissant entièrement nue devant le groupe. L'une des habilleuses, comme le prince les avaient appelées m'enveloppa dans un tissu et elles s’affairèrent toutes autour de moi. Les gardes étaient ressortis. Elles me brossèrent, me coiffèrent les cheveux en chignon, me passèrent de la crème parfumée et pailletée sur le corps puis me firent passer une très longue robe blanche. Jamais je n'avais touché un tissu aussi doux et léger. Si ce n'avait été pour aller vers ma perte et celle de mon futur royaume, j'aurais été ravie de porter une telle tenue. Elles me vaporisèrent du parfum, quelque chose de fruité, un mélange d'acidité et de sucré à la fois. Dehors nous entendîmes des cris puis ce fut le silence. Cela recommença à trois autres reprises, puis elles me demandèrent de les suivre. Mon cœur palpita à une vitesse folle, et l'angoisse d'être bientôt unie à une chose qui me terrorisait s'empara entièrement de moi.



- Suivez-moi princesse, me lança un autre lutin qui venait d'entrer.



Je ne l'avais encore jamais vu. Il me tendit le bras pour que je m'y accroche mais je refusai. Que croyait-il ? Que j'allais être une gentille petite princesse...



- Conduisez-moi à mon bourreau, qu'on m'unisse à votre prince et que je me laisse mourir.



- Vous voyez le prince de cette façon ?



- Pourquoi le verrais-je autrement? Toute mon enfance, vous n'avez eu de cesse de m'appeler, de vouloir que j'entre dans ces bois. Vous m'avez faite enlevée par l'un de mes ...par Marin et maintenant je vais être unie contre mon gré. Alors oui, je vois votre prince comme un être immonde, sans respect et comme celui qui va me conduire à ma perte.



- Vous vous trompez. Tout ce que notre prince veut, c'est conduire son peuple au même rang que les autres créatures des bois.



Je ne lui répondis pas, cela aurait été une perte de temps.
Je le suivis. Dehors, des dizaines de lutins délimitaient le chemin que nous empruntâmes. Au bout, les lutins étaient en cercle, seul, au centre, le prince et un autre lutin attendaient mon arrivée. Je m'arrêtai, regardai derrière moi, autour, je cherchai désespérément une issue mais rien ne me vint. La nuit tombait et seuls de grands flambeaux éclairaient les lieux.



- Avancez princesse.
- Et si je refuse ?
- Je serai obligé de vous y contraindre. Avancez, ça vaut mieux.



Je repris ma marche et avançai, mais le plus lentement possible. Il ne me fallut pas non plus toute la nuit pour arriver aux côtés du prince des lutins. J'eus beaucoup de peine à retenir un haut le cœur lorsqu'il me prit la main. Je tentai aussitôt de la retirer mais il me la serra de manière à ce que je n'ai pas le choix.
Le lutin qui était près de lui joignit ses mains aux nôtres et commença à entonner un chant suivit par les voix de toutes les créatures présentes. Il enchaîna ensuite par tout un discours auquel je ne compris rien mais qui semblait émouvoir toute l'assemblée.



- Princesse, acceptez-vous de vous unir à notre prince ?
- Non, criai-je créant une foule de murmures.



Les mains des deux lutins me serrèrent un peu plus.



- Je vous repose la question. Nous attendons un oui me chuchota-t-il. Princesse, acceptez-vous de vous unir à notre prince ?



- J'a....



- Elle refuse lança une voix dans l'assemblée.













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